Une autre histoire. Un autre défi. Une nouvelle ère. Les conseillers nationaux de transition de Guinée ont entamé ce lundi les plénières, moins de 48 heures après leur installation. Une session sur fond d’attentes notamment de la part des citoyens qui souhaitent eux aussi une refondation de l’Etat et la consolidation des assises démocratiques.
Face d’ailleurs à ces énormes défis de reconstruction constitutionnelle et législative, certains juristes, comme Dr Alhassane Makanera Kaké, propose quelques clés pour permettre aux 81 membres du CNT et au peuple de Guinée de doter le pays d’une Constitution digne de nom, et qui sera un gage de stabilité sociopolitique dans le pays.
Pour lui, au-delà des autres fonctions, le CNT doit procéder à un diagnostic constitutionnel. « La mission qui est attribuée au CNT par la charte, c’est de rédiger une Constitution, des textes législatifs, suivre le processus de la transition ou participer à l’unité nationale. Mais le grand problème se situe au niveau de la nouvelle Constitution. Vous n’êtes pas sans savoir que la Guinée s’est déjà dotée de 5 constitutions en un laps de 60 ans. Ce qui est trop, à mon avis. Et dans les cinq constitutions, on a connu 4 périodes d’exception. Ça veut dire que nous sommes à la neuvième situation constitutionnelle. Ce qui signifie que les cinq premières Constitutions n’ont pas répondu aux réalités guinéennes. C’est pourquoi, le premier travail du CNT c’est de faire une révision de 1958 à 2020 pour savoir qu’est-ce qui n’a pas marché ? Qu’est-ce qui a manqué ? Pourquoi il y a la casse de la mécanique institutionnelle ? Il s’agit donc d’identifier. Le deuxième, il faut connaître l’aspiration du peuple. Nous voulons quoi ? Troisième, il faut tenir compte des réalités socioéconomiques, politiques, géographiques et même multidimensionnelles de la Guinée. Parce qu’un texte n’a de valeur que s’il est considéré ou pris en compte par la société dans laquelle le texte s’applique. Si la société n’accepte pas une règle, ce n’est pas la peine d’appliquer cette règle », déclare M. Kaké.
Poursuivant son intervention, le juriste estime qu’il ne suffit toute fois pas faire table rase des acquis de ces dernières années. Il faudra plutôt s’en servir pour parvenir à un résultat cohérent et accepté de tous. « Est-ce qu’il faut donc recommencer à zéro avec le CNT ?Je dis non. Parce qu’on ne peut pas dire que tout un peuple de 63 ans ou plus n’a pas pu bien faire. Donc il s’agit, comme je l’ai dit, de faire un diagnostic de la révolution constitutionnelle pour tirer les mérites, les capitaliser et aussi corriger ce qui n’a pas fonctionné. »
S’inspirer des Constitutions occidentales ou mettre en place une Constitution purement guinéenne ?
Pour Docteur Alhassane Makanera Kaké, cette tâche revient aux nouveaux membres du conseil national de transition. « C’est au CNT de faire des propositions. Mais ce qui est important, il faudrait, pendant cette transition, dans l’élaboration de la constitution, qu’on ait la même maîtrise. Ce qui signifie la traduction de la Constitution dans nos langues nationales. Et qu’il y ait quand même un consensus des juristes sur les terminologies pour éviter des débats inutiles », conclut-il.
Gassime Fofana