Les 18 et 19 juillet 2017 a eu lieu un colloque organisé par la Confédération Africaine de Football à propos des réformes voulues par son nouveau président, le malgache AHMAD AHMAD. Fraîchement élu à la surprise générale aux dépens de l’inusable, l’inamovible l’impondérable lion, Issa HAYATOU.Le nouveau président avait fait campagne en proposant un colis de réforme de la CAN qui a contribué à faire pencher la balance en sa faveur lors du congrès électif de la CAF du jeudi 16 mars 2017 à Addis-Abeba qui l’a propulsé à la tête de la lucrative confédération. (Par Hamidou BAH, Gestionnaire des marchés publics, Consultant international, Spécialiste des questions géopolitiques internationales)
Parmi les projets qu’Ahmad Ahmad avait dans sa besace, on peut citer notamment la fréquence, la période de compétition, le nombre de pays qualifiés. Il faut rappeler que M. HAYATOU avait donné une fin de non-recevoir en ce qui concerne la période d’organisation de la compétition arguant notamment l’impossibilité d’organiser la compétition durant la saison des pluies dans les pays tropicaux. Beaucoup de spécialistes se sont en outre tiraillés sur l’augmentation ou non du nombre de pays pouvant prendre part à la phase finale de la CAN ainsi que la fréquence de la tenue de celle-ci.
- LA FREQUENCE
Remettre en cause la bi annualité de l’organisation de la CAN relève d’une folie, selon certains observateurs. Il faut noter avant tout que la tenue d’une CAN annuelle est d’ores et déjà rejetée en bloc et cette hypothèse met tout le monde d’accord. La réforme dans ce cadre-là consiste à soit garder la bi annualité, soit faire la compétition tous les trois ans ou encore tous les quatre ans.
Il a été décidé de jouer la compétition tous les deux ans. Il faut souligner que faire du copier-coller de l’Euro, c’est-à-dire jouer tous les 4 ans serait une hérésie car le niveau du football africain n’est pas le même que celui européen. Organiser une CAN tous les trois ans ou quatre ans va donc pénaliser les footballeurs car ils n’auront pas pour beaucoup d’entre eux, les chances de remporter des trophées et ainsi garnir leur palmarès. Il en va de même pour les joueurs locaux qui verront s’évanouir leurs infimes chances de jouer des compétitions de haut niveau afin d’acquérir de l’expérience et se montrer en espérant trouver un club plus huppé.
Ibrahima Traoré, attaquant de la Guinée, sur Foot224.net
« Je n’ai pas de problème à ce que ça soit 24 équipes ou 16, mais de là à l’appliquer dès maintenant, je trouve que c’est un peu tôt. Ils auraient pu laisser cela pour la CAN d’après. (…) Je trouve que c’est une décision un peu bizarre. Peut-être que ça représente une solution plus tard car ça permettra à plus d’équipes de se qualifier et d’avoir des chances de se montrer. Mais là on a déjà commencé les éliminatoires. Le pays hôte doit aussi s’adapter, au niveau de la logistique de la préparation.«
Garder l’organisation de la CAN tous les deux ans est donc un principe sacro-saint pour les Africains qu’il ne faut surtout pas toucher. Le nouveau boss de la CAF l’a compris et, avec ses conseillers, a décidé de ne pas toucher à la fréquence de la tenue de la compétition.
- LA PERIODE
En voilà un changement, on peut même dire une révolution ! Il faut rappeler que sous le règne de l’ancien président de la CAF Issa HAYATOU, il était hors de question de toucher à l’organisation de la CAN au mois de janvier. Il a argué le fait qu’il est quasiment impossible de jouer pendant la saison des pluies. A tort ou à raison, la nouvelle équipe a décidé d’en faire autrement et de déplacer la phase finale au mois de juin.
Si certains des anciens footballeurs qui étaient les invités d’excellence du président AHMAD ont salué cette réforme, nombreux sont ceux qui sont encore sceptiques.
D’aucuns justifient leur pessimisme par le fait que les joueurs seront en fin de saison et donc la fatigue ne va pas leur permettre de se donner à fond, ce qui impactera sur la réelle implication de ceux-ci. Certains penseront à la durée limitée de leurs vacances tandis que d’autres lèveront le pied de peur des blessures et de facto, perdre leur place de titulaire au sein des clubs.
Papa Agyemang, agent de joueur, au micro de la BBC
« Cela facilitera mon travail en tant qu’agent. Les clubs l’utilisent comme une excuse (la CAN en janvier, ndlr) pour ne pas signer des joueurs africains. Ils deviendront plus attractifs car les équipes ne songeront pas à les perdre tous les deux ans.«
L’autre argument et non des moindres, est bien sûr la saison des pluies. Notons qu’effectivement en cette période, il pleut abondamment en Afrique surtout dans les zones tropicales, ajouter à ça le fait que les stades en Afrique ne sont pas couverts, on est donc en droit d’émettre de sérieuses réserves sur la réussite tant sur le plan sportif que sur le plan organisationnel.
Pour d’autres, ceux optimistes, les arguments sont justement le contraire de ce qui est avancé plus haut. On peut souligner le fait que les footballeurs qui jouent en Europe n’auront plus la pression des clubs, voire les menaces au cas où ils viennent jouer la CAN. Ç’a toujours été le même refrain durant des années, les clubs qui ont dans leurs effectifs plus de deux ou trois Africains dont les pays sont qualifiés essaient de tout faire pour les dissuader d’aller en sélection. L’un des exemples illustratifs a eu lieu entre Liverpool FC et le défenseur camerounais Joël MATIP. Il y a des joueurs qui refusent carrément la sélection tandis que d’autres s’inventent des pseudos blessures pour faire plaisir à leurs clubs, quitte à avoir tout le pays à dos. On peut bien entendu, comprendre l’inquiétude des clubs car non seulement c’est une valeur ajoutée qui diminue, et donc ça peut les pénaliser et perdre des points, et de l’autre côté ce sont les dommages collatéraux concernant les cas de blessures (joueurs et clubs impactés). Cette peur de blessures pousse certains footballeurs à lever le pied et provoquer une élimination prématurée de leur pays.