Abstention record, razzia de la République en marche!, gifle pour le PS, déception pour le Front national et la France Insoumise… le premier tour des législatives, dimanche, a été riche.
Égrenés tout au long de la soirée, dimanche, les résultats du premier tour des élections législatives ont été largement favorables à La République en marche! d’Emmanuel Macron, en ne laissant que des miettes aux Républicains, tandis que la France Insoumise et le Front national ont obtenu des résultats décevants. Ce succès pour la majorité présidentielle a néanmoins été entaché par une abstention record. Europe 1 fait le point sur les leçons à tirer de ce scrutin.
Une élection qui ne mobilise pas
C’est le premier chiffre à être tombé, et il avait de quoi interpeller. Un électeur sur deux ne s’est pas déplacé dimanche pour aller voter. En 2012, le taux de participation avait frôlé 59% au premier tour. Il était de plus de 60% en 2007. Cette abstention record a largement été rappelée par les perdants de l’élection. Jean-Luc Mélenchon en a souligné « l’immensité », François Baroin a jugé qu’elle témoignait de « la persistance des fractures de la société française ». « Ce taux d’abstention catastrophique pose la question du mode de scrutin », a ajouté Marine Le Pen.
Plusieurs responsables politiques ont aussi souligné la longueur des campagnes électorales, celles des primaires puis de la présidentielle, qui ont pu entraîner une lassitude chez les électeurs. Pour le Premier ministre Edouard Philippe, cette abstention est aussi « la conséquence de la démobilisation de certaines formations politiques, qui n’ont pas trouvé un second souffle après l’élection présidentielle perdue ».
Et de fait, dans le détail, ce sont bel et bien les électeus des partis battus qui se sont moins mobilisés. Alors que 68% des gens qui avaient voté Emmanuel Macron à la présidentielle ont fait le déplacement pour le premier tour des législatives, selon une enquête Ipsos, cela n’a été le cas que de 45% des électeurs de Marine Le Pen, 45% de ceux de Jean-Luc Mélenchon et 42% de ceux de Benoît Hamon. L’électorat de droite, lui, s’abstient moins (65% de participation).
La prime au vainqueur de la présidentielle
C’est un mécanisme classique des élections législatives : après avoir porté quelqu’un au pouvoir, les Français ont toujours eu tendance à lui donner ensuite une majorité. C’est d’autant plus le cas depuis le passage au quinquennat, qui a aligné les législatives sur la présidentielle.
Cette fois, néanmoins, la configuration exceptionnelle de l’élection d’Emmanuel Macron laissait planer le doute sur l’obtention d’une majorité. Un président qui se disait ni de droite ni de gauche avait réussi à attirer les électeurs de l’une et de l’autre de ces deux familles politiques. Mais ces derniers seraient-ils prêts à ne pas retomber dans le clivage traditionnel droite/gauche pour les législatives, qui plus est alors que de nombreux candidats LREM étaient de parfaits inconnus ?
Finalement, ce doute a été levé. LREM a obtenu plus de 30% des suffrages, ne laissant que des miettes aux autres partis.
Les ministres en passe de sauver leur tête
Pour six membres du gouvernement candidats aux législatives, l’enjeu était énorme : une défaite aurait signifié à la fois un camouflet au niveau local et une obligation de démissionner. À l’issue du premier tour, Bruno Le Maire, Christophe Castaner, Richard Ferrand, Marielle de Sarnez et Mounir Mahjoubi, soit cinq ministres candidats sur six, sont arrivés en tête dans leur circonscription, et se retrouvent en ballotage favorable pour le second tour. Il n’y a qu’Annick Girardin, candidate à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est arrivée à égalité avec son rival Stéphane Lenormand, avec 41,59% des suffrages. Il faudra attendre dimanche prochain pour avoir la confirmation qu’aucune démission n’est nécessaire.
Le cimetière des éléphants (socialistes)
Comme prévu, ces législatives ont été catastrophiques pour le Parti socialiste, qui voit plus de 70 de ses députés sortants éliminés dès le premier tour. Parmi eux, des poids lourds, à commencer par l’ancien candidat à la présidentielle Benoît Hamon. Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS, n’est arrivé que quatrième dans la 16e circonscription de Paris. Patrick Mennucci à Marseille, comme Aurélie Filippetti en Moselle, ont été laminés. Karine Berger (Hautes-Alpes), Laurent Baumel (Indre-et-Loire), Jean-Marc Germain (Hauts-de-Seine) n’ont pas non plus atteint le second tour.
L’hécatombe a été particulièrement sévère pour les anciens ministres de François Hollande, comme Christian Eckert, Cécile Duflot, Emmanuelle Cosse, Kader Arif, Pascale Boistard ou encore Juliette Méadel.
Contre-performance pour le FN
Au lendemain du premier tour de la présidentielle, alors que sa candidate était qualifiée pour le second, le Front national tablait sur une quarantaine de députés à l’Assemblée nationale. C’est peu dire que les résultats des législatives n’ont finalement pas été à la hauteur. Passant de 21,3% pour Marine Le Pen le 23 avril dernier à environ 13,5% des suffrages, le FN a perdu plus de quatre millions d’électeurs. Obtenir un groupe parlementaire, soit 15 députés, semble désormais hors de portée.
Symbole de cette « déception », comme l’a admis le vice-président du parti, Florian Philippot : plusieurs figures de proue ont été éliminées dès le premier tour, comme Nicolas Bay en Seine-Maritime et Jean-Lin Lacapelle dans les Bouches-du-Rhône. Reste le (très) bon score de Marine Le Pen, qui a obtenu environ 45% des voix dans sa circonscription du Pas-de-Calais.
Et aussi… Contre-performance, aussi, pour la France Insoumise, qui placerait une cinquantaine de candidats seulement au second tour. Loin, bien loin des sept millions de voix obtenus par Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la présidentielle. Quant à LR, la seconde place du classement général derrière LREM est une bien piètre consolation. Avec 20% des suffrages, la droite ne peut espérer constituer une opposition solide. Le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer, a d’ailleurs reconnu un premier tour « décevant pour notre famille politique », quand Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR, a déploré un « échec incontestable ».
Europe 1