Mines / Transformation sur place : « la décision du Président est salutaire »

Comme on le sait, la Guinée est dotée d’immenses ressources naturelles. Mais quand on prend de l’indépendance à nos jours, la quantité de bauxite exploitée et des mines globalement, on se rend compte qu’à travers le revenu engendré, la Guinée ne bénéficie pas réellement sinon suffisamment des retombées de ces exploitations. « Force est de constater que des attentes ne sont pas comblées du côté de nos populations et le gouvernement en est conscient. Cela ne peut pas continuer. Vous avez signé des conventions d’établissement avec le gouvernement guinéen. Ces conventions contiennent de part et d’autres des engagements et des obligations. Un engagement ou une obligation non tenu est une cause de nullité. Il en est aussi du processus de transformation de nos matières premières que vous exploite. C’est pourquoi leur transformation sur place devient incontournable. C’est un impératif et sans délai parce que plusieurs conventions mentionnent le raffinage sur place. Et très malheureusement, Ces engagements sont restés lettre morte aujourd’hui. Et pendant ce temps , le chômage, la pauvreté et les dégradations de la qualité environnementale prennent de l’ampleur dans les zones minières en particulier, tandis que ces sociétés minières ne cessent d’accroître leurs chiffres d’affaires », a martelé Colonel Mamadi Doumbouya, au cours d’une récente rencontre avec les responsables de sociétés minières évoluant en Guinée.

Pour mettre ou remettre l’équilibre d’une coopération économique (minière) favorable à la Guinée et aux Guinéens, le président de la transition a instruit le gouvernement de faire une évaluation des conventions par des cabinets spécialisés de manière à rétablir l’équité des relations entre « vos sociétés et la République de Guinée. »

Mais pourquoi la Guinée ne profite pas assez de l’exploitation de ses ressources naturelles ?

Selon Dr Alhassane Makanera Kaké, analyste et spécialiste en Finance publique, plusieurs facteurs interviennent pour expliquer la faiblesse du revenu tiré des ressources minières. « Premièrement, le mode d’exploitation joue beaucoup. Dans la concession que nous utilisons souvent, les biens produits appartiennent pratiquement à la société, aucune structure fiable voire neutre de contrôle de la production n’existe. En d’autres termes, c’est la société qui extrait, qui produit et qui vend , puis elle nous dit c’est ce que j’ai vendu, voici votre part. Donc on n’a aucune possibilité de contrôler la production. Deuxièmement, pour qu’on gagne, on est associé. Il y a le coût additionnel du transport. Et si on transporte, le coût est très très élevé. Donc il faut soustraire tout cela avant de partager les bénéfices. Mais dès qu’on transforme les ressources sur place, beaucoup de coûts additionnels seront éliminés comme les transports routier et maritime qui sont excessivement chers. Mais le plus important, si on produit sur place, nous bénéficierons de l’effet direct. On va pouvoir créer beaucoup d’emplois et la consommation aura un impact sur l’économie et sur le social. D’ailleurs, c’était la volonté de l’ancien président, Ahmed Sékou Touré. Le premier programme qu’il a mis en place, c’était de pouvoir installer des usines ici comme l’usine d’aluminium et d’alumine. Mais ces projets n’ont pas pu être réalisés parce que si on faisait cela, la Guinée sort gagnante mais les partenaires n’avaient pas assez de marges. C’est pourquoi ils n’ont pas voulu le faire maintenant là. Exemple, la bauxite est extraite par la CBG, l’usine se trouve au Cameroun. Mais pourquoi ils n’ont pas l’usine auprès de la zone de production ? C’est juste pour nous fatiguer. C’est pourquoi la décision du Président de la transition est salutaire, c’est l’opposé de celle d’Alpha Condé, qui disait , il faut qu’on soit premier exportateur. On exporte la matière première, la valeur ajoutée est très faible », explique-t-il.

Que faire pour réussir cette fois le pari ?

« Il faut qu’on ait des fins négociateurs, pour que dans la négociation, la Guinée puisse sortir gagnante. Pour moi, ce sont des conditions essentielles. Une fois qu’on a la volonté politique, il faut ensuite de bons négociateurs qui ne vont pas laisser les partenaires nous proposer les contrats, mais plutôt, c’est la Guinée qui doit proposer les contrats. Et je vous dis, il suffit qu’il y ait la volonté politique pour construire les usines et exploiter sur place. En d’autres termes, tant que la Guinée n’a pas la possibilité de faire l’exploitation de ses ressources sur place, nous gagnerons peu d’argent, et ça impactera négativement notre politique d’emploi notamment. C’est pourquoi il faut encourager l’initiative du Président pour produire sur place. Et dès maintenant, créer un comité de réflexion pour la mise en œuvre de l’idée présidentielle. Parce qu’en fait le Président donne des idées, et l’administration cherche à transformer ces idées en actions », propose Dr Makanera.

Gassime Fofana

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