Mardi tendu à Kankan. La deuxième ville du pays a été ébranlée par des manifestations de jeunes qui réclament le courant électrique. Des barricades ont été érigées à plusieurs endroits et les forces de l’ordre, cibles de projectiles, ont dispersé les manifestants à coups de gaz lacrymogène. Adama Kourouma, membre du parti Guinée Debout et candidat aux élections législatives du 22 mars dernier, a été témoin de cette journée de tension. Il a accepté de nous dépeindre l’atmosphère qui prévaut à Kankan et de nous parler des revendications des jeunes.
Bonsoir Monsieur Kourouma.
Bonsoir
Quelle est la situation qui prévaut aujourdhui et quel est le constat à Kankan ?
La situation à Kankan est très préoccupante aujourd’hui. Les affrontements on été enregistrés dans tous les grands ronds-points de la ville depuis ce matin entre les jeunes manifestants et les forces de l’ordre. Ce qui a provoqué l’arrêt de toutes les activités. Mais il faut noter que ces manifestations sont le résultat d’une longue frustration accumulée et causée par le manque criard de courant électrique à Kankan considéré comme fief du parti au pouvoir et de surcroît deuxième ville du pays. À Kankan actuellement c’est 4 nuits dans l’obscurité et une nuit d’éclairage de 19h à 1h du matin. Par ailleurs depuis que Alpha Condé est arrivé au pouvoir la Haute Guinée n’a bénéficié d’aucun projet d’envergure. Pas de route entre Kankan-Mandiana, Kankan-Kérouané-Beyla Kankan-Kissidougou, ni les 35 km de goudron offerts à la ville de Kankan par Moussa Dadis Camara. À cela s’ajoute le manque d’électricité. Donc le constat est très alarmant.
Vous voulez nous dire que cela constitue un frein au développement socio-économique de la ville ?
Absolument mon cher. Si Kankan avait de l’électricité aujourd’hui 24/24h, la croissance économique serait impressionnante, Kankan est une ville commerciale où les 90% de la population vivent du petit commerce. L’abondance du courant électrique permettrait à de nombreuses personnes de réaliser les activités génératrices de revenus, l’industrialisation des activités serait une réalité partout. Ça aurait encouragé les partenaires économiques à investir davantage dans la ville. Ce qui donnerait plus d’emplois à la jeunesse.
Justement, nous parlons aujourd’hui des politiques. Est-ce que selon vous dans ce mouvement pour réclamer le courant, on peut soupçonner des mains noires derrière ?
Je dis tout de suite que cette manifestation est organisée par le « Collectif des jeunes pour l’électrification de la Haute Guinée à travers un barrage hydroélectrique « . Il n’y a aucune manipulation politique derrière même si les autorités locales et certains cadres veulent forcément qu’elle ait une connotation politique pour pouvoir réprimer. C’est une population qui exprime son ras-le-bol face à une situation lamentable qui a perduré. Tant que nous faisons un jugement politique de cette situation, nous nous éloignons carrément de la plaque et les problèmes ne feront que s’accumuler.
Est-ce qu’il y avait des négociations entre les autorités et les jeunes en colère depuis le début de la crise ?
La seule négociation dont j’ai eu les informations était celle de la notabilité qui a demandé à la jeunesse de reporter les manifestations au mardi car lundi était un jour de deuil suite au décès de certains notables. Sinon les autorités administratives étaient dans leur refus habituel, malheureusement.
Est-ce que vous nous confirmez qu’il y’a eu des arrestations pendant la journée de ce mardi ?
Effectivement il ya eu plusieurs arrestations dont celle du porte-parole de la coalition BEKI LOVE, un artiste évoluant dans le groupe du rap Puissance mandingue. Mais je viens d’être informé que certains ont été libérés ce soir.
Merci!!
Propos recueillis par Aliou Diallo