La cuisson des briques est une activité qui mobilise des centaines de personnes dans la préfecture de Coyah, à l’ouest de la Guinée. Au-delà de ce qu’elles peuvent rapporter, c’est surtout les conditions dans lesquelles ces briques sont produites qui inquiètent. Plongée au cœur d’une activité qui rime avec efforts physiques et risques de maladies.
Fodé Ismael Camara est chef d’un chantier de cuisson de briques ordinaires à Manéah, dans la préfecture de Coyah. Assis à même le sol, trait tiré et drapé dans des habits fléchis par le soleil, ce quadragénaire est prodigue en mots lorsqu’il est question de décrire la souffrance quotidienne dans ce chantier hors du commun. « La cuisson des briques ordinaires est une activité vraiment pénible. Tout commence par la fabrication par des briques d’argile ( mélange d’eau et de terre). Cette boue le plus souvent compacte est mise en forme gr)ace à des cadres de bois conçus à cet effet. Ces briques sont ensuite mises au soleil pour sécher avant d’être placées dans des fours pour leur combustion. Au cours de cette étape, on peut passer une heure de temps à ventiler pour que les bois s’enflamment dans le four », explique-t-il.
Comme lui, nombreux sont des riverains de Manéah qui subissent des épreuves difficiles de production des briques ordinaires. Sur des nombreux chantiers qu’on rencontre ici, il n’est pas rare de trouver des personnes exposées au soleil ardent et à la fumée. Un « bronzage » forcé qui dure parfois des heures et des heures et finissent par éreinter le briquetier. « Lorsque les bois s’enflamment, on passe le reste du temps, parfois trois jours, à surveiller le feu et ce, jusqu’à la fin du processus de cuisson. De là, on ressort avec la fatigue intense et les douleurs corporelles », ajoute notre interlocuteur.
Après ces moments de calvaire, les briques finies sont stockées les unes sur les autres en attendant d’éventuels preneurs.
Malgré tout, le chantier de Manéah ne désemplit pas. Il recrute même chaque jour de nouveaux adeptes. C’est le cas de Mohamed Lamine Camara. Élève, il vient régulièrement se « débrouiller » ici après les cours. « Je ne veux pas rester à la merci des gens ou vivre aux dépens exclusifs de mes parents. C’est pourquoi je viens sur ce chantier pour gagner de quoi me nourrir et me vêtir. Aujourd’hui je ne me plains pas », déclare-t-il.
En venant à la briqueterie locale de Manéah, Fodé Ismael et Mohamed Lamine ne rêvaient que d’une chose : s’offrir l’indispensable pour survivre. Mais les difficiles conditions de travail les découragent sans pour autant les désarmer. Ils comptent rester ici jusqu’à ce qu’ils trouvent d’autres activités moins contraignantes mais plus lucratives ailleurs. En attendant c’est sur ce chantier qu’ils puisent la force de leur sourire et le plaisir de leur quotidien.
Seydouba Camara