Est-ce du populisme ? Est-ce un exemple pour inciter les autres acteurs à s’intéresser davantage à l’agriculture ? Est-ce au final une solution pour amorcer la croissance afin de résoudre les problèmes alimentaires en Guinée ? Chacun y va de ses questions depuis l’apparition dans leurs champs respectifs du Chef de l’Etat, Colonel Mamadi Doumbouya et de plusieurs membres du gouvernement.
C’est une instruction présidentielle qui est en phase de se réaliser. Il y a cela six (6) mois, le Président de la Transition exhortait les membres du gouvernement à s’investir dans l’agriculture. Objectif, montrer l’exemple aux populations dans la lutte contre l’insécurité alimentaire en Guinée. Après les travaux pour mettre en œuvre cette instruction, le Chef de l’Etat et plusieurs membres du gouvernement ont commencé à visiter leurs champs agricoles. C’est Colonel Mamadi Doumbouya qui a ouvert le bal en visitant son champ de 59 hectares à Maferinyah, préfecture de Forécariah. On verra ensuite à l’œuvre le Premier ministre, Bernard Gomou, dans son champ de riz à Sireyah, dans Moussayah, préfecture de Forécariah, la ministre de la communication, le ministre de l’enseignement pré universitaire avec un domaine agricole de 50 hectares à Boffa ou encore celui des Affaires étrangères, pour ne citer que ceux-ci.
Ainsi, pour Salif Kéita, ingénieur agronome, voir les ministres faire de l’agriculture est une bonne chose. Mais, relativise-t-il, cela ne constitue pas un moyen pour favoriser le développement généralisé et durable en Guinée. « C’est bien quand on voit les membres du gouvernement dans leurs champs agricoles. Mais cela ne saurait être une politique agricole. Pour combattre l’insécurité alimentaire par le développement agricole, l’État devrait plutôt apporter un appui technique, financier, économique, écologique et agro-industriel aux paysans ruraux car, environ 60 à 70% de la population pratiquent l’agriculture. Donc créer des conditions adéquates à ces ménages et groupements ruraux, serait promouvoir l’autosuffisance alimentaire dans le pays parce que, quand ils ont des outils et expertises modernes, l’activité de ces paysans peut créer des revenus qui sont dépensés dans les communautés rurales et qui stimulent l’économie locale. Ce qui concourt également à assurer la quiétude et la sécurité dans ces zones en particulier », indique l’agronome qui ajoute : « mais si le pouvoir public, qui devrait être un instrument de régulation, se transforme en paysan, cela pourrait affaiblir l’agriculture à la base. Car, au lieu de mettre les moyens agricoles à la disposition des paysans et groupement ruraux, il les mettra à sa disposition, et de ce fait, l’État serait vu dans beaucoup de zones agricoles comme un concurrent. Un gouvernement devrait plutôt être une source d’aide et de facilitation pour les paysans. Cela en donnant les moyens de production agricole modernes dans les zones rurales, investir dans les infrastructures, notamment des routes, des sites de stockage et de traitement, des marchés, des systèmes de communication et des réseaux d’approvisionnement fiables et durables pour les agriculteurs », propose l’agronome.
Gassime Fofana