L’Afrique, continent du 22ème siècle ? Les précisions de Dr Dansa Kourouma (suite et fin)

Bien que l’Afrique soit absente des première, deuxième et troisième révolutions industrielles, elle dispose aujourd’hui de toutes les possibilités, selon certains analystes, pour être le continent du 22ème siècle. Il suffit, déclare Docteur Kourouma Dansa, d’inverser le paradigme et de procéder à  un changement qualitatif et quantitatif des structures socio-économiques et politiques voire démocratiques ou démographiques du continent. Dans cette dernière partie de son analyse, le Président du Conseil national des organisations de la Société civile de Guinée accentue sa réflexion sur plusieurs paramètres qui peuvent aider à développer le continent africain et lui permettre de rester la locomotive de l’économie mondiale. Lisez !

Acquis touristiques de l’Afrique , condition essentielle de son émergence économique

« Mais le tourisme. La France et l’Espagne s’apprêtent à ouvrir leur siège festival. Et imaginez combien de millions ? Près de 35 millions de touristes sont attendus en France , avec plus de 50 milliards d’euros attendus. Alors qu’est-ce que la Guinée attend ? Un beau pays, un beau continent dont l’écosystème est encore intact . Tout ce qui peut attirer, faire l’objet de visite au moins existe en Afrique. Donc au-delà de la pression sur nos ressources minières, il faut s’ouvrir à d’autres moyens comme le tourisme, qui est une opportunité surtout pour le développement rural notamment l’agriculture, la pêche », déclare Dr Dansa Kourouma qui précise : « l’Afrique peut nourrir le monde entier , à condition qu’on soit capable de mécaniser notre agriculture et moderniser notre pêche et notre élevage. Donc enfin, il est important que l’intégration africaine soit au rendez-vous , pour que le continent pèse dans la bourse internationale, pour que l’Afrique pèse dans la diplomatie internationale mais aussi dans les finances internationales. Nous devons parler d’une seule voix. Donc l’intégration africaine à travers l’union africaine et la zone de libre-échange continentale sont des facteurs de souveraineté économique , qui sont indispensables pour que l’Afrique puisse tenir tête aux États Unis, à la France, à la Chine et à l’Europe. »

Capital humain, un des atouts de l’Afrique

« Enfin, l’atout le plus capital que le continent a, c’est la jeunesse de sa population. Et c’est ce qui va à l’encontre des autres pays parce que le développement numérique rime avec l’innovation et cette dernière rime avec la jeunesse. Donc nous avons un continent jeune, dont la jeunesse est ouverte déjà à la technologie. Il faut juste internaliser la technologie dans la gestion de l’administration , dans la gestion des finances, dans la gestion des ressources et surtout dans la gestion des services. Et si on est capable de le faire, l’Afrique a tout pour être le continent du 22ème siècle. Mais politiquement, on doit cesser d’avoir des élections truquées, il faut que la nouvelle élite politique puisse se positionner avec d’autres offres politiques. Parce que les offres politiques que proposent les gauches, les droites ou les centres sont dépassées. Il faut se positionner en termes de capitalisme éclairé ou de socialisme éclairé. Donc il faut qu’il y ait des nouveaux leaders politiques africains, qui soient capables de ces mutations.

Mais comment valoriser le capital humain ?

« En réalité, il faut investir sur le capital humain. Je vais vous dire pour que la position de l’Afrique soit soutenue, il va falloir dépenser dans la formation. Il faut que la jeunesse africaine soit vite formée. Et pas formée obligatoirement en Europe, mais formée sur place. Pour cela, il faut délocaliser les grandes universités pour que les formations soient données en Afrique. Ça coûte moins cher et ça évite la dépravation des valeurs, mais également le mirage de l’occident. Donc cette délocalisation des grandes formations adaptées aux réalités du continent, où les faits et les pratiques sont sur places est un élément qui peut soutenir la position géopolitique et économique du continent africain. Après l’éducation, c’est investir dans la santé. Et cet investissement passe par l’honnêteté budgétaire. Il faut que la gestion du budget tienne compte des défis des secteurs sociaux dont l’éducation, la santé. C’est capital. Et la santé va avec dépense. Il faut allouer à la santé autour de 30% et l’éducation naturellement soit autour de 40 ou 45% du budget. Donc je pense que la justice et l’équité budgétaire sont très importantes. Et c’est un maillon fort de la gouvernance. »

Comment faire de la démographie un instrument de développement ?

« Il faut investir dans le dividende démographique aussi. Pour moi la question démographique est une autre question de développement. Les chercheurs ont prouvé que tous les pays qui ont connu un développement stable, ont inversé leur démographie. C’est le cas de la Chine. Le pays a adopté une politique de l’enfant unique pour être ce qu’elle est aujourd’hui. Donc la démographie rime aussi avec le développement parce que si le taux de naissance et le taux de décès sont maîtrisés par les progrès de la science, il y a une explosion démographique qui va rendre difficile le développement du pays. C’est pourquoi il faut maîtriser la démographie tout en investissant dans l’éducation des enfants et la santé des mères, pour que le temps de travail soit augmenté à travers l’espérance de vie », propose Dr Dansa avant de poursuivre : « parce que le vrai problème du développement, c’est la productivité. Et nous avons une productivité très faible en Afrique à cause de l’inadéquation de la formation, des maladies, mais aussi de l’espérance de vie qui est autour de 50%. Et imaginez que vous terminez les études à 25 ans, vous n’avez que 25 ans de travail. Et en Europe , espérance de vie est autour de 65 à 77 ans. Ce qui fait que le temps de travail est plus élevé en Europe qu’en Afrique.

Une justice financière et budgétaire indispensable à la stabilité sociopolitique

« Et je pense que cette justice est une justice capitale parce qu’elle permet de réduire les conflits et les guerres. Les guerres en Afrique, surtout en Afrique de l’Ouest sont dues à l’injustice dans la gestion des ressources et des richesses. L’oligarchie qui dirige le pouvoir prend tout. c’est la famille, les parents. Les ressources du continent sont monnayées en liquidités et placées dans les banques occidentales. Ce qui fait d’ailleurs que l’influence de l’occident sur les cadres africains est encore plus forte. Parce que leur argent est caché là-bas. Si tu ne coopères pas, on bloque ton argent. Je pense qu’il faut en finir avec tout ça, et que le continent puisse avoir un leadership résiliant face à ces vieilles pratiques, qui n’ont contribué qu’à enfoncer l’Afrique », conclut Dr Dansa Kourouma.

Gassime Fofana

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