Bien que l’Afrique soit absente des première, deuxième et troisième révolutions industrielles, elle dispose aujourd’hui de toutes les possibilités, selon certains analystes, pour être le continent du 22ème siècle. Il suffit, déclare Docteur Kourouma Dansa, d’inverser le paradigme et de procéder à un changement qualitatif et quantitatif des structures socio-économiques et politiques voire démocratiques ou démographiques du continent. Dans cette réflexion en deux parties, le Président du Conseil national des organisations de la Société civile de Guinée apporte son éclairage sur ce rendez-vous lointain mais qui pourrait voir l’Afrique régner sur les autres continents du monde.
Certes difficile, mais pas impossible. Telle est bien la vision du président du Conseil national des organisations de la société civile de Guinée. Dans un entretien à notre rédaction, Dr Dansa Kourouma explique l’impulsion économique, politique, technologique et sociale qui pourrait faire de l’Afrique le continent du 22ème siècle. Car, pour lui, avec un changement de politique et une prise de responsabilité, notre continent a toutes les potentialités pour être à ce rendez-vous universel. «Je vais vous dire de manière claire, l’Afrique a tous les atouts pour être le continent du 22e siècle. Mais il faut le déclic. Et cela doit se faire au niveau du leadership du continent. Alors pour que l’Afrique se positionne comme le continent du 22ème siècle, nous devons changer les paradigmes de notre développement, surtout de notre gouvernance. D’abord, il faut qu’on internalise la démocratie, la repenser selon les besoins du continent africain. Et l’internalisation de la démocratie exige qu’on ait des institutions qui tiennent compte de notre histoire, mais aussi les défis du développement », soutien Dr Dansa Kourouma avant d’ajouter : « vous savez, je suis un démocrate. Mais je ne voudrais pas que la démocratie, telle que nous l’avons connue après la deuxième guerre mondiale soit imposée à l’Afrique. Il faut que notre démocratie soit calquée sur les acquis des grands empires comme l’Empire du Ghana ou celui du Mali. Des acquis en termes de cohésion, de respect des valeurs de la société, de construction d’institutions communautaires solides. Il faut que ces acquis soient respectés. Il faut réinventer la démocratie à l’africaine. »
« L’Afrique doit cesser d’être l’éternelle mendiante »
Par ailleurs, poursuivant son analyse, Dr Kourouma regrette la dépendance économique et financière du continent vis-à-vis de l’Occident. Une dépendance qui, selon lui, n’est qu’une entrave au développement de l’Afrique. C’est pourquoi l’acteur de la société civile propose une mutation de leadership qui pourrait constituer un gage pour mener et défendre les intérêts du continent africain devant les autres. «Le deuxième aspect, c’est le plan de développement durable. l’Afrique doit cesser d’être l’éternelle mendiante. Cette créature -là qui a tous ses bras au complet, tous ses organes au complet, mais, assise sur une mine d’or, tend la main aux passants pour avoir un peu de jetons. Il faut ce changement pour qu’on ait un nouveau leader politique en Afrique notamment dirigée par les hommes, surtout les jeunes et les femmes, des réformateurs, qui soient capables d’abord de marquer la stabilité interne du continent. En faisant quoi ? En gérant de manière rationnelle les ressources minières et mettre en place une diplomatie agressive pour que l’Afrique exerce sa souveraineté, une indépendance illimitée sur ses ressources naturelles. »
Échange inégal dans le commerce international
Les activités liées aux échanges de biens et de services sur la scène mondiale est un facteur de développement. Mais son mécanisme actuel se fait au détriment du continent noir car, pour Docteur Dansa Kourouma, négocier les prix des matières premières de l’Afrique dans les instances commerciales des pays occidentaux est un moyen pour déséquilibrer la balance commerciale, qui enfin ne permet pas aux Africains de tirer l’intérêt conséquent de leurs produits de base. « Tant que les prix des matières premières sont discutés au London metal ou à la bourse de Paris, je vous assure que l’Afrique ne bénéficiera jamais des retombées de ses ressources. Parce que ces vieux continents n’ont plus de ressources minières, énergétiques pour soutenir leur développement, qui devient encore plus exigeant. Donc j’insiste sur ce leadership politique en Afrique. Mais ça ne va pas s’obtenir sans un environnement de stabilité et de sécurité. Mais également il faut que la jeunesse africaine ose briser les préjugés, casser les obstacles pour pouvoir s’intéresser à la vie politique, pour qu’on puisse voir l’émergence d’une nouvelle classe politique en Afrique. Une classe politique qui est capable de discuter d’égal à égal avec les dirigeants européens, américains et asiatiques. Ensuite, sur la bonne gouvernance. Elle est un paramètre essentiel. Parce qu’il faudrait que l’Afrique soit capable de transformer des ressources sur place et de lutter contre la corruption. Vous savez, le risque fondamental que couvre l’existence de plusieurs industries et de plusieurs ressources exploitées sur place, c’est l’affluence des capitaux étrangers. Et qui parle de capitaux parle de corruption. L’Afrique se trouve être le continent le plus corrompu, parce que notre corruption est une pratique impitoyable. On brade tout au détriment de la population. Certes, il y a la corruption aussi aux États-Unis, mais cette corruption se trouve minimisée à cause du contrôle rigoureux sur les flux financiers, à cause de la garantie du système bancaire , de la capacité technique de l’administration, mais aussi de la digitalisation. Et l’Afrique n’a pas de possibilité de contrôler ses capitaux. C’est pourquoi, il faut que la nouvelle élite africaine travaille sur cette expertise là , afin que nous ayons un système financier entièrement digitalisé pour que le contrôle sur ce système soit là. On ne peut pas développer l’Afrique quand les capitaux sont encore cachés dans les réseaux informels. Ensuite, je pense que ce leadership n’est pas seulement politique, il est aussi entrepreneurial. Il faut une nouvelle classe d’entrepreneurs africains , des jeunes qui doivent aller à la pointe pour l’innovation. La quatrième révolution exige l’innovation dans le domaine du numérique, exige la maîtrise du numérique. Il faut que la jeunesse africaine cesse d’attendre des concours de recrutement à la fonction publique. Il faut que chacun puisse créer on entreprise , innover pour répondre aux milliers de services qui attendent nos populations. »
Gassime Fofana