C’est sur décision politique du Président feu Ahmed Sékou Touré, que le franc guinéen est créé le 1er mars 1960. Et par la suite, il sera caractérisé par un poids d’or de 0,0036 g et une parité fixe avec le franc CFA de 1 pour 1. Selon les témoignages de certains économistes, en ce moment, le franc guinéen n’était ni exportable ni importable, et les devises étrangères, mais également le franc CFA, ne pouvaient pas sortir du territoire. Quelque temps après, précisément le 2 octobre 1972 est créé le syli mais sera plus tard démonétisé en 1986, pour être remplacé par le franc guinéen , arrimé sur le dollar américain, au taux de 1 USD égal 300 francs guinéens. Aujourd’hui, 1er mars 2021, la République de Guinée célèbre donc le 61e anniversaire de sa monnaie nationale. Cette autre caractéristique de l’indépendance politique de notre pays représente un véritable symbole pour les économistes, mais par la suite qui regrettent la légèreté et la mauvaise gestion de cette monnaie de 1984 à nos jours. « Il est évident le fait que la Guinée ait choisi sa monnaie est une très bonne chose parce que la souveraineté économique en ce temps est accompagnée par la souveraineté monétaire. Ça veut dire que notre pays ne peut pas subir de la même manière les contre coups de la décision extérieure comme dans la zone franc CFA où en réalité c’est la France qui commande. Donc nous on est pas soumis à ça, et c’est une bonne chose », explique Docteur Alhassane Makanera Kaké.
Dans l’autre aspect de son intervention, le spécialiste des Finances publiques regrette la mauvaise politique qui marque la gestion de ce symbole de souveraineté. « Mais sur le plan de sa gestion, il y a eu assez de défaillances. L’avoir c’est bon, mais elle est comme si on a une bonne voiture, et on la remet à un mauvais chauffeur, il fait l’accident. C’est dans ce cadre. Pour sa gestion au départ en »86 », 300 francs guinéens étaient échangés contre 1 dollar taux officiel. Mais aujourd’hui, c’est 10.000 francs guinéens et quelques. Ce qui signifie réellement qu’il y a une dévaluation, qu’on n’a pas su gérer la monnaie », explique-t-il. Un phénomène qui se justifie, selon lui, par le fait que « la valeur de la monnaie est supportée par son économie. Mais là où on a échoué, c’est qu’on n’a pas eu une politique nationale de gestion de devises. En Guinée, beaucoup de monnaies circulent en même temps, alors qu’une seule monnaie devrait circuler. Vous partez à Madina, vous pouvez acheter en devises, vous pouvez le faire aujourd’hui même. Vous avez euros ou dollars, vous trouvez une marchandise, vous payez en dollars par exemple. Et puis on vous donne la monnaie en francs guinéens. Ça signifie que notre masse monétaire n’est pas connue par les autorités. Parce que la masse monétaire représente la quantité de la monnaie qui circule à un moment donné. En réalité, bien qu’il y a à la banque centrale le marché des enchères et des devises, c’est Madina qui fixe à la place des autorités nationales », déplore-t-il.
Quelles solutions ?
Pour faire face à cette anarchie monétaire dans le pays mais aussi valoriser la monnaie nationale, Dr A. Makanéra Kaké propose : « pour pouvoir maîtriser, il faudrait qu’il y ait interdiction formelle et absolue de l’utilisation d’autres monnaies en dehors de la monnaie nationale et les transactions à l’intérieur du pays, mais aussi que toutes les monnaies soient sous le contrôle des autorités monétaires étatiques. »
La présence des grandes coupures sur le marché : quels effets sur l’économie ?
Le paysage des transactions en Guinée devient de plus en plus pauvre en matières de petites coupures. Une réalité que Dr Kaké interprète comme un facteur qui contribue à la hausse des prix. « Cela signifie que les petites coupures n’ont pas de valeur. Il n’y a aucun produit qu’on peut avoir aujourd’hui à 50 francs. Alors qu’au début, le transport était à 25 gnf et les taxis à 75 gnf. Aujourd’hui c’est 1.500 ou 2.000 francs par tronçon. Cela s’explique par la non maîtrise de la monnaie et de la production qui amène la dévaluation la monnaie », dit-il avant de conclure : « et plus la monnaie dévalue, plus les prix augmentent, plus les petites coupures n’ont plus de valeur. »
Gassime Fofana