Hadja Christine Sagno est l’une de ceux qui mettent leur énergie au service de la protection de l’environnement. Elle a commencé sa carrière à la direction nationale de l’environnement où elle a occupé le poste de chef service de la division faune et protection de la nature. Elle est également spécialiste et ancienne ministre de l’environnement. Nous l’avons rencontrée pour parler de ce domaine qui lui tient particulièrement à cœur.
Bonjour madame. Comment se porte l’environnement aujourd’hui en Guinée ?
En tant qu’ancienne ministre de l’environnement, je pense que l’environnement se porte bien. Parce que j’ai une fierté d’avoir instauré en 2016 le repos biologique. Parce que je me suis dit, lorsque vous laissez les gens couper le bois toute l’année, ce n’est pas bien. Et puisque nous avons trois ou quatre mois de reboisement, alors pourquoi ne pas instaurer ce repos. Et permettre aux gens de la filière bois de consacrer ce temps-là au reboisement.
Quand vous avez eu l’idée d’instaurer ce repos biologique, comment l’initiative a-t-elle été accueillie au niveau de la filière bois ?
Les acteurs de la filière bois ont difficilement accepté cette idée. Mais puisque moi je suis de la matière, je me suis dit qu’il fallait lutter pour que ça passe et cela est passé. C’est très bien. Aujourd’hui ils apprecient non seulement, mais aussi, ils sont engagés à restaurer l’environnement.
Vous faisiez partie de la délégation qui a conduit la Guinée à la COP 22 à Marrakech, au Maroc. Quelles observations faites-vous des conventions signées par la Guinée dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique ?
Je pense que la Guinée est en très bonne position par rapport au changement climatique. Parce que c’est vrai, c’est nous qui avons organisé la COP 22 qui a été une réussite. Cest au cours de cette rencontre qu’il a été demandé à tous les pays de faire du reboisement une priorité. Et vous avez vu l’année dernière, l’initiative présidentielle qui a couvert presque tout le pays dans ce cadre. Donc cette initiative a été bien saluée. Aujourd’hui on a un autre problème auquel on doit faire face, c’est la protection des têtes de sources. Comme vous le savez, beaucoup de fleuves prennent leurs sources en Guinée. Mais quand vous sillonnez ces têtes de sources, vous vous rendez compte qu’elles sont déboisées, les berges de ces grands cours d’eau sont déboisées.
Quelle analyse faites-vous de la place de la femme surtout dans le domaine de l’environnement ?
La femme guinéenne a un grand rôle à jouer dans la protection de l’environnement et elle a une place importante. D’abord c’est l’épouse d’un exploitant forestier, c’est l’épouse d’un agriculteur, elle est la maman d’un braconnier, c’est l’épouse d’un chasseur. L’agriculture et l’exploitation minière voilà des activités qui dégradent l’environnement. Et j’invite les préfectures qui abritent les sociétés minières à y réfléchir dès maintenant. Parce que la dégradation elle est là, le climat est invivable. Ça me fait très mal. Parce que je me dit si nous dégradons l’environnement, on en aura les conséquences plus tard. Nous n’aurons rien à dire à la future génération. Et on aura des comptes à rendre à nos petits enfants, puisqu’ils nous poseront des questions comme : il n’y a plus de forêts en Guinée, qu’est-ce qui se passe ? Et c’est des questions difficiles à répondre. C’est pourquoi j’invite les femmes à s’impliquer dans la protection de l’environnement et surtout dans les zones minières.
Vous êtes justement à la tête d’une association de femmes qui évolue dans le domaine de l’environnement. Quelles sont les actions que vous menez sur le terrain ?
C’est l’association des femmes de N’zérékoré, Yomou et Lola. Nous évoluons dans la protection de l’environnement. Parce que c’est ce que je connais. Si vous m’envoyez dans un autre domaine, je ne peux rien faire. Je me suis dit qu’on peut bien servir sa nation, son pays sans être ministre de l’environnement. C’est pourquoi j’ai créé cette association qui travaille dans le domaine de l’environnement. Nous faisons la vulgarisation des foyers améliorés. En 2005 il y a eu une étude menée par la FAO, sur l’exploitation du bois de chauffe. Après cette étude on s’est rendu compte que le bois de chauffe était l’exploitation la plus importante dans notre pays. On a introduit alors les foyers améliorés. On a formé plus de 200 femmes à Kissidougou en techniques de fabrication des foyers améliorés en banco. Et nous travaillons sur la sensibilisation des populations sur les feux de brousse en Guinée. Généralement notre cible, ce sont les femmes et les jeunes. Parce qu’on s’est rendu compte que quand il y a sécheresse ce sont les femmes qui endossent, ce sont elles qui parcourent des kilomètres pour aller puiser de l’eau. L’association fonctionne bien et les femmes adhèrent parfaitement à l’idée.
Merci madame
C’est à moi de vous remercier.
Propos recueillis par Aliou Diallo