ELECTIONS AFRICAINES : QUID DES COUPS K.O. ?

Qu’ont en commun Alpha CONDE, Ibrahim Boubacar KEITA, Alassane OUATTARA, Paul BIYA, Mamadou BUHARI et Macky SALL? Ce sont des présidents réélus dès le premier tour avec comme slogan : un coup K.O. C’est une situation nouvelle dans les démocraties ouest africaines qui est différente de celle importée de la Russie par certains pays d’Afrique centrale (Angola, RDC), avec les arrangements entre présidents sortants et futurs présidents(Par Hamidou BAH, Chargé de la commande publique, Consultant international, Spécialiste en Géopolitique)

Des présidentielles où les présidents sortants ont tous été réélus au premier tour avec parfois des scores à la soviétique. On se demande si c’est une avancée ou un recul de la démocratie ? Les pouvoirs en place sont-ils devenus si forts ou alors ce sont les oppositions qui sont en berne ? En tout état de cause, il faut souligner que les forces en présence ne sont pas les mêmes que l’on soit dans un pays ou dans l’autre.

LA FORCE DU POUVOIR EN PLACE ET LA MENACE D’UN RECUL DE LA DEMOCRATIE

Le slogan Coup K.O. a été utilisé pour la première fois pendant les élections présidentielles de 2015 en Guinée. Les militants du puissant parti présidentiel le Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG) rompus aux joutes de la politique guinéenne se sont mobilisés des mois durant pour infliger une défaite cuisante à l’opposition. Dans leur imaginaire, il était question de gagner la présidentielle avec un lourd score d’un côté mais aussi avec une leçon de victoire qu’ils vont donner à l’opposition qui, au lendemain des élections, se retrouve groggy par le coup reçu. Depuis, le slogan a été repris par les partis au pouvoir au Mali et au Sénégal avec les résultats que l’on connait.
Mais il convient de constater ici que ces scores ne reflètent pas à proprement parler les réalités sociales ni électorales. Dans le déroulement des campagnes électorales, les pouvoirs en place ont toujours été accusés d’avoir utilisé l’argent public pour bâtir leurs campagnes électorales à coup de dons et de promesses de tous genres. Face à cette machine électorale, les partis d’opposition qui vont toujours en rang dispersé ne peuvent pas tenir la dragée haute au parti au pouvoir du fait d’un côté de leur faiblesse financière mais aussi de leur morcellement en de multitudes partis à base communautaire et/ou régionale.
Un élément historique explique en partie ces coups K.O. il s’agit de la déclaration d’un ancien président africain qui disait : « je ne vais pas organiser des élections pour les perdre ». Cette déclaration lourde d’enseignements va donner des idées aux présidents qui ont envie de s’accrocher au pouvoir et ceux qui veulent faire leurs deux mandats coûte que coûte.
L’administration est donc mise à contribution pour œuvrer à la mise en place des fraudes massives, oubliant son obligation de neutralité. En Afrique subsaharienne, les employés de l’administration ont tendance à confondre le service public et le service au président. Nombreux sont les cadres qui occupent de hautes fonctions dans l’appareil étatique et sont des militants inamovibles du parti au pouvoir. Ces mêmes cadres ont tendance à retourner leurs vestes dès qu’il y a alternance pour toujours continuer leur démagogie
En prenant en compte ces éléments cités ci-haut, on se rend compte que ces victoires ont un prix et c’est le peuple et la démocratie qui en pâtissent. Cela marque carrément un recul de la démocratie.

DES OPPOSITIONS EN BERNE ?

Cet aspect dépend encore une fois des pays. En Guinée par exemple, en ce qui concerne la mobilisation, la principale formation politique, l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (l’UFDG), est une machine dans le domaine. Les militants sont déterminés et les dernières élections communales ont montré que le parti a une assise territoriale très forte. Concernant les présidentielles par contre, il y a du chemin à faire. Les alliances et contre alliances entre principales formations politiques de l’opposition ne font que les affaiblir. Cela a été le cas au Sénégal, au Mali, en Côte d’Ivoire et j’en passe.
La logique voudrait que les oppositions de ce pays présentent une candidature unique si elles veulent vraiment de l’alternance. Mais cette hypothèse est quasiment impossible en Afrique francophone, du fait notamment de la main invisible qui sème la brouille entre les différentes formations politiques.
D’un côté les pouvoirs en place usent de la politique de diviser pour régner en prônant le communautarisme et l’ethnocentrisme pour jeter le discrédit au sein de l’opposition et de l’autre côté les querelles d’ego entre les dirigeants de différentes formations politiques font qu’il est pratiquement impossible de dégager un consensus autour de la personne qui doit incarner une candidature unique. L’exemple le plus récent concernant ces ententes mort-nées nous vient de la République Démocratique du Congo (RDC) où les ténors de l’opposition se sont réunis à Genève pour choisir un candidat unique qui devrait affronter le candidat du pouvoir. A peine l’accord signé les militants d’un des partis ont contesté et cela a conduit à l’abandon de l’idée d’une candidature unique.
Dans certains pays, les oppositions ne sont pas vraiment des oppositions en témoignent leurs mercatos incessants entre les oppositions radicales et les mouvances présidentielles. Ce manque de constance permet aux présidents en place de bien les utiliser en période préélectorale en leur promettant des postes dans le futur gouvernement en échange de leur soutien.
Ces différentes alliances et contres alliances font que les oppositions manquent de constance et de conviction. Cela a pour conséquence un manque de crédibilité interne et internationale.
En somme il me revient de partager cette constatation lue dans Médiapart qui dit :« En Afrique Noire, les partis au pouvoir partagent avec ceux de l’opposition ce syndrome des autocraties du passé qui conduit les acteurs politiques africains à se penser propriétaires absolus d’un pouvoir d’Etat qu’ils pensent être encore en capacité de s’octroyer, à peu de frais, au moyen de promesses démagogiques sans avoir répondu concrètement aux besoins des populations ».

One thought on “ELECTIONS AFRICAINES : QUID DES COUPS K.O. ?

  1. C’est un projet fondamental pour la jeunesse africaine en générale et celle de la Guinée en particulier. Si tous les cadres et intellectuels pensaient comme toi mon cher, Nous serions loin aujourd’hui mais hélas chez nous dans la plupart des cas les sois disant intellectuels sont les artisans de ces merdes qui perdurent, ils sont prêts à tout pour remplir les poches et tromper leurs frères et soeurs. Oufffffff

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